Riyad Mahrez a tapé et usé le ballon dans sa cité à Sarcelles en banlieue parisienne, que ce «fou de foot» a osé quitter à 18 ans sans intégrer de centre de formation. Un choix payant: malgré un parcours «atypique», voici l’«anomalie» Mahrez au sommet.
Si on rembobine son histoire, personne n’aurait imaginé que le jeune milieu offensif du Val-d’Oise affronterait le Paris SG mercredi sous le maillot de Manchester City en demi-finale aller de Ligue des champions (21h00).
En réalité «une seule personne y a cru, c’est Riyad lui-même», confie Hayel Mbemba, ancien coéquipier à l’AAS Sarcelles, le club où l’international algérien a appris son football.
«Il a une force de caractère au-dessus de la moyenne», assure son ami qui le décrit comme «un fou de foot et encore, c’est un euphémisme». A 23h00, dans son quartier des Sablons, il n’était pas rare de tomber sur Riyad en train de taper un foot.
«Dès qu’il y avait un terrain, il jouait, même sans lumière, personne ne pouvait l’arrêter!», s’amuse Hayel Mbemba qui a été aussi son surveillant au collège. «Sa réussite, il ne la doit qu’à lui-même.
Il avait une confiance inébranlable, même en cas de coup dur. Certaines personnes peuvent penser que c’est de l’arrogance mais ce n’est pas le cas», explique Mohamed Coulibaly, le directeur de l’AAS Sarcelles.
«Trop frêle»
A qui voulait l’écouter, le jeune Riyad affirmait: «Je vais y arriver, je ne sais pas comment mais je vais jouer la Coupe du Monde au Brésil». Ses éducateurs rétorquaient: «Tu n’arrives même pas à jouer à Sarcelles!», relate Mohamed Coulibaly. Jeune, la «pépite de Sarcelles» avait les qualités techniques mais «son retard physique» a joué en sa défaveur, expliquent ses anciens éducateurs.
A 18 ans, intervient la bascule. Il quitte Sarcelles pour faire des essais à Quimper (Finistère) qui évolue en CFA. Puis, «il part à la recherche d’un contrat pro» et «prend son courage à deux mains» et postule dans les équipes où il y a des réserves professionnelles comme à Marseille ou au Havre, détaille Hayel Mbemba.
Le club normand qui évolue en L2 lui fait signer son premier contrat pro avec l’équipe réserve en 2011. Après quatre années au Havre où il finit par rejoindre l’équipe première, Riyad Mahrez part tenter l’aventure anglaise avec Leicester qui joue alors en deuxième division. Au départ, le joueur est «hésitant».
Il «sollicite l’avis de ses amis à Sarcelles et finit par se convaincre d’y aller», confie son entourage. Dès lors, Riyad Mahrez écrit sa légende: après la remontée de Leicester en Premier League, il est de l’épopée des modestes «Foxes» jusqu’au titre de champion d’Angleterre 2016, au nez et à la barbe des grands clubs du pays.
Puis il signe parmi les superstars de Manchester City en 2018 et y décroche un nouveau titre de champion en 2019, soulevant aussi la Coupe d’Afrique des nations avec la sélection algérienne.
«Une source d’inspiration»
«Son parcours est une anomalie du football. Il a déjoué les pronostics avec ses qualités techniques», analyse Hayel Mbemba. Pour Franck Satougle, ancien équipier en senior à Sarcelles, «Mahrez, c’est ce qui se fait de mieux dans le monde.
Quand je le regarde à la télé, il faisait les mêmes dribles à 10 ans», certifie celui qui l’a aussi entraîné en U13. Son parcours, «c’est le rêve de tout jeune de banlieue, il est à quelques pas de remporter le plus beau trophée européen avec un parcours atypique», s’enthousiasme le coach.
Il a vu grandir Riyad Mahrez, «le mordu du ballon» et se souvient encore que «même en évoluant chez les pros au Havre, il revenait le dimanche jouer au foot devant son immeuble!». A Sarcelles, c’est la «fierté locale», confirme Patrick Haddad, le maire de la commune située à moins de 20 km au nord de Paris.
Il lui a décerné la médaille de la ville en 2019, lors d’une cérémonie à la mairie sous les yeux émus de sa maman Halima. «Riyad est une personne respectée, qui a une discipline physique et mentale exemplaires. Il est une source d’inspiration pour les Sarcellois», soutient le maire. «C’est un bon gars qui a gardé son âme d’enfant et qui s’exprime avec le ballon», ajoute son ami Hayel Mbemba.
Le capitaine de l’équipe d’Algérie est resté attaché à sa ville. Il s’inscrit dans une démarche de transmission en invitant des jeunes à Manchester pour assister aux matches des Citizens et échanger sur ce parcours si «atypique» débuté à Sarcelles, où un stade à son nom sera inauguré cet été.