Le football algérien s’est installé dans le court terme, sans vouloir en sortir, a affirmé le directeur technique national Rabah Saâdane dans une interview à Jeune Afrique publiée mardi, déplorant la négligence de la formation des jeunes joueurs.
«Parce qu’il y a une vision à court terme, le football algérien s’est installé dans ces habitudes, sans vraie volonté d’en sortir», a-t-il dit au sujet d’un «désintérêt progressif» dans cette discipline très populaire, faisant constater qu’aujourd’hui, «on veut des résultats immédiats».
«Prenez les clubs professionnels : tout l’argent est consacré à l’équipe A. On va chercher des joueurs dans des pays africains, à qui on offre de très gros salaires. On va chercher des entraîneurs étrangers, souvent européens, à qui on offre aussi de bons salaires», a-t-il expliqué, regrettant qu’il n’y ait «plus d’argent pour le reste», en raison de l’explosion de la masse salariale des joueurs algériens.
Evoquant la formation, l’ancien sélectionneur des Verts a indiqué que depuis les années 1970 et 1980, durant lesquelles le fonctionnement du football algérien, soutenu à l’époque par des entreprises nationales, «était professionnel, structuré», «il n’y a pas eu de volonté de relancer vraiment la politique de formation, pourtant essentielle pour le football d’un pays». «Si rien n’est fait à la base, a-t-il dit, on ne peut pas bâtir à long terme», prenant en exemple la formation dans des pays comme la France, l’Espagne, la Tunisie, le Ghana ou le Nigeria.
A propos du renforcement de l’équipe nationale par les joueurs algériens binationaux, Rabah Saâdane a estimé que c’est une «très bonne chose» que l’Algérie puisse compter sur des joueurs nés en France et qui ont profité de la formation française. «Ils ont rendu de grands services et nous avons besoin d’eux, maintenant et à l’avenir», a-t-il soutenu, soulignant par ailleurs que pendant des années, «on a trop négligé le football local». «Or, l’Algérie est un vrai pays de football, avec des jeunes et un énorme potentiel.
La formation des jeunes, mais aussi des entraîneurs, a été négligée depuis au moins 10 ans. Il y avait une direction technique nationale (DTN), mais sans moyens. En 2009, alors que j’étais sélectionneur, j’avais souhaité reprendre en mains la DTN, ce qu’on m’avait refusé», a-t-il expliqué, relevant que la réalité est que l’Algérie est «rarement» sur les compétitions continentales de jeunes, les CAN U17 ou U20.
Pour lui, il faut mettre en place un «travail de fond» et une DTN «forte, bien structurée, avec des moyens», précisant qu’il faut travailler aux niveaux local, régional et national. «Il faut penser au futur. L’Algérie dispose d’un important réservoir de joueurs, mais il est mal exploité», a-t-il estimé, mettant en valeur la politique de formation engagée par la France, dans les années 1970, qui lui a permis de récolter les fruits plus tard. «Nous avons pris beaucoup du retard.
Le travail est immense, tout cela va prendre du temps. Tout le monde doit comprendre que nous ne pouvons plus continuer ainsi», a-t-il conclu.