Le quotidien sportif français L’Équipe s’est une nouvelle fois distingué, non pas par une analyse de fond ou un reportage pertinent, mais par une caricature à la limite du mépris, publiée dans son édition qui a suivi la qualification de l’Algérie au prochain Mondial. Cette fois, la cible n’est autre que Luka Zidane, nouveau venu dans les rangs de la sélection algérienne et fils du légendaire Zinédine Zidane.
Dans ce dessin, on voit Luca Zidane assis sur le banc de touche, observé par une horde de photographes qui semblent plus intéressés par sa présence que par le match lui-même. Avec ironie, il lance : « Vous ne préférez pas prendre un peu en photo le match ? Il y a un but qui se marque là… ». À côté de lui, un coéquipier à la barbe fournie célèbre un but dans l’indifférence générale.
Le message est à peine voilé : Lucka Zidane serait une star médiatique sans réelle valeur sportive, attirant l’attention uniquement grâce à son nom. Quant à son coéquipier barbu — stéréotype usé du joueur maghrébin —, il est réduit à une figure folklorique ignorée.
Une provocation gratuite, une de plus
Cette publication s’inscrit dans une longue série de provocations médiatiques visant les joueurs franco-algériens qui choisissent de représenter l’Algérie.
Le cas de Luca Zidane n’est que le dernier en date. Avant lui, de nombreux binationaux ont été ciblés par des remarques sarcastiques ou des articles teintés d’ironie, comme si leur décision de tourner le dos à l’équipe de France constituait une trahison ou un acte incompréhensible.
Ce genre de traitement médiatique trahit un malaise persistant dans une partie de la presse française face à la double appartenance culturelle. Plutôt que de respecter les choix souverains de jeunes joueurs qui veulent honorer leur patrimoine familial ou leurs racines, certains préfèrent recourir à la moquerie, ou pire, à l’insinuation blessante.
Luka Zidane : un choix mûri, une décision respectable
Il faut rappeler que Luca Zidane n’est pas un adolescent manipulable ou en quête de buzz. Il a fait un choix assumé, tardif certes, mais réfléchi.
S’il a décidé de rejoindre les Verts, c’est sans doute pour renouer avec une identité qu’il porte en lui, tout comme son père l’a toujours revendiquée avec fierté, sans jamais renier la France pour autant.
Le sport devrait être un terrain de respect et de tolérance, où les décisions personnelles ne sont ni caricaturées ni tournées en dérision. Cette caricature de L’Équipe ne relève pas de l’humour léger, mais bien d’une volonté de dévaloriser un choix sportif et personnel.
Le plus inquiétant, c’est que ce genre de contenu se normalise. Dans un contexte où les tensions identitaires sont déjà exacerbées, où les jeunes joueurs d’origine maghrébine sont constamment appelés à « choisir leur camp », la presse devrait jouer un rôle d’apaisement, non de division.
Ce traitement éditorial, déguisé en humour, n’est qu’un reflet d’un double standard persistant : lorsqu’un joueur choisit l’équipe de France, il est « intégré », « méritant » ; lorsqu’il choisit l’Algérie, il devient « ingrat », « opportuniste », ou simplement « non prioritaire ».
L’affaire Luka Zidane n’est pas simplement une anecdote médiatique. Elle illustre un malaise profond dans le rapport de certains médias français à la diversité, à la binationalité, et à l’idée que l’on puisse aimer plusieurs pays à la fois.
Respecter le choix de Luka Zidane, ce n’est pas seulement respecter un footballeur, c’est respecter un être humain, une histoire, et une identité multiple. Il est temps que certaines plumes de L’Équipe s’en souviennent.
